Dans une ville de la banlieue de Tokyo, la vie suit tranquillement son cours : les mères de famille s’occupent de leur intérieur tout en jalousant celui des autres, les pères se croisent au café du coin et s’inquiètent de leur retraite à venir, tandis que les fils passent leur temps à regarder la télévision chez un voisin jugé trop excentrique.

Un soir, les jeunes Minaru et Isamu pressent leurs parents pour avoir leur propre poste de télévision, en vain : l’aîné se met alors en colère face à l’hypocrisie des adultes et décide de faire une « grève de la parole », aussitôt suivi par son jeune frère…

I love you ! répète à tout bout de champ Isamu. Impossible de résister à la bouille adorable et à la malice de ce petit garnement.

Dans Bonjour, comme dans la plupart de ses autres films, Yasujiro Ozu dépeint la famille japonaise dans tous ses états, en proie aux changements de la société. Le langage participe à l’humour de cette chronique sociale et familiale burlesque, mais il sert aussi à interroger les rapports humains. L’anglais par exemple (la langue de l’occupant américain au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale) sert dans ce film aux enfants, à clouer le bec aux adultes et à détourner leur attention pour aller regarder les matchs de sumo, sur le poste de télévision des voisins. Ainsi, les outils de la mondialisation ne vont pas forcément à l’encontre des traditions ancestrales, semble vouloir nous dire Ozu.

Le temps passe et chaque génération vit avec son temps. Le cinéaste interroge toutes les formes de communication possibles, y compris le silence, le fait de parler pour ne rien dire ou encore le langage corporel. Ce dernier est d’ailleurs l’occasion de scènes hautement burlesques qui ne manqueront pas de faire rire les jeunes spectateurs. Avec leurs copains, Minoru et Isamu s’amusent à émettre des pets en se touchant le bout du nez. Le gag pourrait être grossier mais il ne l’est nullement grâce à un bruit qui est plus proche du klaxon que de celui du pet.

Sous la direction d’Ozu, la poésie n’est jamais loin de la comédie, ni de tout autre genre d’ailleurs. Bonjour, dans son éloge de la fantaisie et de l’inutile, n’est pas sans rappeler Mon Oncle de Jacques Tati, réalisé un an plus tôt en France.